Oui je sais j’aurais pu me dispenser de ce jeu de mot au sujet de cette histoire qui concentre toutes les attentions.
Tout d’abord, quelle que soit la qualification des faits dont a été victime le jeune Théo, il faut bien définir les agissements des policiers comme un acte de violence illégitime. Pour ce qui est de la pénétration de l’anus de la victime avec une matraque, j’ai un peu de mal à admettre que cela découle d’un fâcheux concours de circonstances !
D’ailleurs, un fait analogue est en cours de jugement. La matraque est une arme de défense et la voilà une arme de défonce à croire qu’il y a au bout de cet ustensile une tête chercheuse particulièrement mal intentionnée. Au-delà des cris d’orfraie de politiciens bien intentionnés et sans doute sincères ou des soutiens aveugles à la police de la part d’autres membres du paysage politique, il est vrai que nous sommes en période préélectorale, le cas Théo nous ramène à une problématique dont certains éléments datent de trente ans et plus.
En ce qui concerne la Police, les contrôles d’identité pratiqués systématiquement, ressemblant comme deux gouttes d’eau à ce que les vieux flics appelaient autrefois les « rondes battues », ont pour but essentiellement d’exercer une pression sur les jeunes des banlieues qui « traînent » et éventuellement de les inciter à changer de lieu voire de ville. C’est inefficace et cela contribue à faire monter une tension compréhensible entre les jeunes et les forces de l’ordre. De désamour on est passé à la défiance puis carrément à la haine. En plus cela ne règle en rien la lutte contre la délinquance.
Il y a d’autres problèmes dans la Police. Ce sont ceux, d’une part, de la formation psychologique des personnels de services locaux et, d’autre part, de l’encadrement. Au niveau de la formation il apparaît nettement que les hommes de terrain ne paraissent pas suffisamment préparés à aborder ou affronter l’hostilité dure des jeunes. Quant à l’encadrement, depuis deux ou trois décennies, l’administration de la Police est devenue un entonnoir inversé avec de plus en plus de bons petits soldats et de moins en moins de gradés d’encadrement tout au moins sur le terrain.
On a donc l’impression que les policiers qui sillonnent les banlieues, sont livrés à eux-mêmes avec tout ce que cela implique comme risques de « débordements » outrepassant la déontologie professionnelle et pouvant constituer des délits graves. Il faut ajouter à cela une certaine influence politique nauséabonde qu’il faut espérer marginale pour en arriver à des faits tout à fait condamnables comme ceux de l’affaire Théo.
SI on va chercher plus loin ce qu’évite bien de faire la plupart des candidats à l’élection présidentielle, le cas Théo repose le problème de la politique de la ville. Depuis trente ou quarante ans, on entend parler de ministères de la ville, de plans « banlieues » et au final c’est un constat d’échec. En contrepartie on a vu se développer une ghettoïsation progressive des quartiers, un communautarisme ethnique ou religieux galopant, une situation de non-droit dans de nombreuses cités. Il faut ajouter un chômage croissant, une montée de l’échec scolaire, un recul de la Culture malgré les efforts louables d’associations qui voient fondre leurs subventions d’années en années.
Pour en revenir à la police, la gauche avait eu la bonne idée de créer une police de proximité mais il n’y a jamais eu vraiment de moyens suffisants en hommes et en matériel pour que cela soit viable. On sait ce qu’il est advenu de cette police sous la droite. Merci M. SARKOZY.
Aujourd’hui, les seuls représentants de l’état face à la population des banlieues ce sont la police, les pompiers et les services de santé et ceux-ci sont la cible privilégiée des actes de violence traduisant une exaspération et une incompréhension des jeunes et des moins jeunes.
Alors soyons vigilants, faisons en sorte que la France ne devienne pas comme les Etats-Unis le théâtre d’actes de violence inexcusables et répétés de la part de la Police contre les populations les plus vulnérables socialement, françaises ou étrangères, ni de ripostes violentes et destructrices émanant d’individus ne croyant plus en rien. Pour cela il faut réconcilier l’Etat avec les banlieues ou quartiers défavorisés avec une vraie politique volontariste impliquant des actions crédibles et durables, totalement dénuées de toute démagogie.
Gabriel BERARD